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Le Palais des femmes fortes

Quand des femmes mettent en commun leurs ressources, leurs talents et leurs espoirs, elles ne se sont pas contentées de mettre sur pied un projet économiquement viable. Elles font aussi leurs premiers pas pour sortir de l’isolement et remodèlent les attentes dominantes, souvent discriminatoires.

© Cartier Philanthropy / Andrea Borgarello

Nabatte se tient sur le bord d’une grande route en terre du village de Kiswaza, dans l’ouest de l’Uganda. Derrière elle, un petit bâtiment de briques abrite un atelier de mécanique et le Molokoni Palace, son restaurant. La salle à manger ne dépasse pas les 4 mètres sur 2 ; la cuisine, des plus sommaires, se trouve dans l’arrière-cour extérieure et compte une cheminée, quelques morceaux de tôle qui forment les murs et le toit, une multitude de casseroles aux dimensions variées, les jerricans d’eau jaunes - omniprésents -, une étagère branlante faite de cageots empilés et deux bancs.

« Le restaurant est tout petit, mais son emplacement est parfait », souligne Nabatte comme pour préciser que son « Palais » est vraiment digne de cette appellation. « C’est un carrefour important que les gens doivent emprunter. Non loin d’ici, il y a une grande entreprise sucrière et ses travailleurs viennent manger chez moi le midi ou le soir. Et juste à droite, se trouve un atelier mécanique. Les mécaniciens sont eux aussi des clients réguliers. En moyenne, j’ai 30 clients par jour, mais cela peut grimper jusqu’à 40. »

Sa voix calme et réconfortante laisse transparaître une satisfaction plus grande que celle que l’on pourrait attendre d’un jeune entrepreneur décrivant les premiers succès de sa nouvelle activité. Ses mots traduisent une nouvelle confiance, une grande détermination et un sentiment de contrôle retrouvé.

« C’est ma mère qui m’a donné l’idée du restaurant. Elle avait son propre établissement à l’époque. Je suis vraiment fière de suivre ses traces et de mettre en pratique les compétences qu’elle m’a transmises.

« J’essaye de changer le menu tous les jours. En temps normal, c’est chèvre ou poulet pendant la semaine et bœuf le week-end (“Molokoni” tire d’ailleurs son nom du ragoût très prisé et composé de jarrets de bœuf). Parfois, on me demande un plat spécifique, surtout les fins de mois, les jours de paie des ouvriers.

« Je passe mes journées à cuisiner, mais je prends aussi soin de mes poules. Elles sont encore trop jeunes pour pondre, mais quand elles grandiront je pourrai alors proposer des œufs et mon propre poulet rôti au menu ! Je cultive également un champ de maïs et je suis ravie des progrès que nous faisons. »

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© Cartier Philanthropy / Andrea Borgarello

Nabette parle en « nous », car trois personnes sont en fait à l’origine du Molokoni Palace : Nabatte et deux autres femmes, toutes deux appelées Moreen. Elles ont mis sur pied ce projet quand elles se sont engagées dans le programme de formation à la création de microentreprises de Village Enterprise. Ce programme offre un capital initial, des formations en entrepreneuriat et finance, un mentorat continu et un soutien à la création de groupes d’épargne visant à développer des modes de subsistances durables pour ceux qui vivent dans l’extrême pauvreté. 

« Regardez-moi ! » poursuit naturellement Nabatte, « Si vous m’aviez rencontrée avant le programme vous me trouveriez méconnaissable ! Mon entourage est souvent surpris de ma réussite, et surtout par les sommes d’argent que je mets de côté. » 

Quand Nabatte et ses deux partenaires ont mis en commun leurs ressources, leurs talents, leur courage et leurs espoirs, elles ne se sont pas contentées de mettre sur pied un projet économiquement viable et rentable. Au contraire, issues d’un environnement extrêmement pauvre, elles faisaient leurs premiers pas pour sortir de l’isolement et de la marginalisation. Elles ont commencé à collaborer et ont ainsi brisé les barrières qui entravaient leur indépendance et leur capacité à se fixer leurs propres objectifs. Des changements qui remodèlent progressivement les attentes dominantes, souvent discriminatoires envers les femmes. 

« Maintenant, les gens continuent de me demander comment nous avons fait. Ils nous regardent avec un profond respect ». Ce sentiment que Nabatte exprime, « le pouvoir d’influencer les événements autour d’elle » est, pour ceux qui l’entendent, un puissant appel aux armes pour les femmes.

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© Cartier Philanthropy / Andrea Borgarello

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