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Entrer dans un monde d’hommes

« Nous sommes toutes et tous capables de réaliser quelque chose ». Cecilia, Artisan de l’année 2020, emploie ces mots pour expliquer ce qui arrive quand on croise Buildher, une entreprise sociale qui favorise l’entrée des femmes marginalisées dans le secteur de la construction.

© Buildher

Au Kenya, comme dans de nombreuses régions du monde, les femmes et les filles en marge de la société peuvent rarement espérer un autre destin que celui dicté par la société. Reléguées à la sphère domestique et exclues des opportunités liées à l’éducation, elles sont habituées à ne tenir compte ni de leurs capacités ni de leurs aspirations personnelles.

Felister, qui a 25 ans et vit à Korogocho, l’un des plus grands bidonvilles de Nairobi, n’enjolive pas son ressenti : « Je vivais comme toutes les femmes du village. », explique-t-elle, « Dès mon réveil, je m’occupais des vaches. Je n’aimais pas ce genre de vie, car je dépendais entièrement de mon mari ou de ma belle-famille afin d’obtenir ce dont j’avais envie. J’avais l’impression d’être un fardeau et de n’avoir rien accompli. Après avoir quitté l’école secondaire, je me suis mariée et j’ai eu mon premier enfant, puis un second, ce qui signifiait que je devais rester tout le temps à la maison. Je n’avais pas d’autre choix. »

Si les femmes rejoignent le marché du travail, elles sont alors confrontées à des préjugés et des stéréotypes si profondément ancrés qu’ils les maintiennent à part, dans des emplois sous-évalués, sous-payés, informels, précaires ou temporaires.

Cecilia, une femme de 35 ans qui vit avec ses deux enfants à Mathare, une zone d’habitat informelle près de Nairobi, se souvient : « J’ai vendu des haricots verts et fait des ménages pendant deux ans. Quand j’avais la chance d’être payée, je gagnais entre 200 et 300 KSh par jour (2-3 dollars), ce qui n’était pas suffisant pour faire vivre ma famille. »

Les chemins de Felister et de Cecilia se sont croisés lorsqu’elles se sont inscrites à l’exigent programme de formation de Buildher, d’une durée de quatre mois, qui leur a permis d’acquérir des compétences techniques reconnues et très recherchées, ainsi que des compétences essentielles en matière de leadership, de résolution des conflits, de formation aux questions de genre et de préparation au monde du travail, entre autres.

Buildher, une entreprise à but non lucratif kényane, favorise l’entrée et le maintien des femmes marginalisées dans le secteur de la construction. Ce domaine compte une force vive masculine à 97 % et le secteur a très longtemps été perçu comme étant uniquement réservé aux hommes. Aujourd’hui, il est confronté à une pénurie alarmante de compétences. Buildher y a vu une double opportunité : d’une part, émanciper les femmes marginalisées, généralement peu ou pas instruites, et de l’autre, remettre en question le fossé entre les sexes, tout en bousculant les mentalités patriarcales.

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© Buildher

« Les compétences de vie m’ont permis une prise de conscience », explique Cecilia. « J’ai commencé à m’aimer. J’ai aussi réalisé que, en tant que femme, je dois me débrouiller seule, en toutes circonstances. L’accompagnement psychologique m’a aidé à gérer mon stress et à me concentrer pleinement sur la formation. La formation en charpenterie et en menuiserie m’a permis d’acquérir les compétences nécessaires pour trouver un emploi chez Ark Construction, où je fais du coffrage et où je gagne 700 KSh par jour (6 dollars et démi). C’est plus du double de ce que je gagnais avant de rejoindre Buildher. »

En 2020, Cecilia a gagné le prix de « l’Artisan de l’année ». « Mon conseil est que nous sommes toutes et tous capables de réaliser quelque chose ». Et cela inclut également de briser les barrières et d’entrer de plain-pied dans un monde d’hommes.

A ce jour, Buildher a formé quatre unités aux techniques de la construction -170 diplômés de 3 unités ont obtenu une augmentation de 530 % de leurs revenus en entrant dans la vie active après seulement 4 mois de formation. L’organisation lie l’acquisition de compétences à des offres d’emploi. Leurs partenaires professionnels indiquent une augmentation moyenne de 67 % de la productivité pour les travaux auxquels participent les femmes de Buildher. Nous soutenons Buildher depuis 2019.

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